C’était sans aucune joie qu’il avait convoqué Aryanna dans une salle vide du lycée. Lui même n’aimait pas le lycée. Il n’arrivait jamais à gérer tous les problèmes de ses élèves. La fac c’était des vacances à côté. Mais ici, n’importe quel problème prenait une tout autre envergure. Peine de cœur, échec scolaire, conflits familiaux … Tout se répercutait ici, dans cette caisse de résonnance qu’est le lycée. Certains s’ne sortent bien, d’autre ne le quitte jamais. Lewis en avait un souvenir brumeux. La révélation, il l’avait eu sur les bancs de l’amphithéâtre.
Aryanna faisait parti de ceux qui avait tout pour bien s’en sortir. Et avec un cœur gros comme ça (et par « comme ça » Lewis entendait aider ses camarades en difficulté avec plus de passion et de persévérance qu’un professeur fraichement diplômé) et des résultats honorables, elle faisait la joie de Lewis. Elle faisait partie des élèves sur qui il aimait bien poser les yeux en cas de doute. Jusqu’ici tout allait bien. Mais depuis quelques temps, il sentait chez elle une baisse de régime. Moins d’attention en cours, notes en berne (et pas que dans sa matière), il la soupçonnait même d’avoir maigri. Lewis s’était fait plein de résolutions avant de commencer sa carrière. Il voulait être parfait, Le prof parfait. Des règles élémentaires à respecter : ne pas coucher avec les étudiantes, ne pas s’écouter parler en amphi, ne pas s’immiscer dans la vie de ses élèves … Il soupira. Foutaises que tout cela. Quoiqu’Aryanna ait fait qui l’ait mise dans cette état, il ne lui en voudrait pas (les conneries, il connaissait). Mais il voulait l’aider. Il lui avait demandé de venir après les cours, il savait qu’elle finissait vers 15h.
Déjà 15h10. Dix minutes ce n’était rien vraiment. L’angoisse. Il entendit ses pas dans le couloir. Il se prépara à changer d’attitude. Fini le prof angoissé, bonjour le Professeur sévère mais juste, et bienveillant. Il se regarda dans le miroir. Ce n’était pas convaincant. Malgré tout, il se sentait vraiment mal pour elle. Si quelque chose la taraudait, il fallait que ce soit réglé. Il se passa la main dans les cheveux, respira un bon coup et ouvrit la porte.